Après avoir lu le texte de ce brevet blanc, remplissez le formulaire et répondez aux questions. Vous pouvez à tout moment revenir sur le texte en utilisant votre souris.
Après avoir répondu aux questions dans ce premier formulaire, cliquez sur le lien Dictée du brevet dans la colonne de droite pour vous entraîner à la dictée.
Ensuite, vous pourrez vous entraîner à la rédaction du brevet en consultant les sujets proposés en cliquant sur le lien Rédaction du brevt dans la colonne de droite (vous pourrez envoyer votre dictée par email, par PRONOTE ou en la remettant au secrétariat de votre collège).
Texte à lire
Dans son roman quasi-autobiographique, L’enfant, Jules Vallès décrit son enfance malheureuse. Au tout début de son ouvrage, l’auteur raconte les châtiments corporels que sa mère lui faisait subir. L’auteur a dédié ce livre « à tous ceux qui crevèrent d’ennui au collège ou qu’on fit pleurer dans la famille, qui, pendant leur enfance, furent tyrannisés par leurs maîtres ou rossés par leurs parents ».
Ai-je été nourri par ma mère ? Est-ce une paysanne qui m’a donné son lait ? Je n’en sais rien. Quel que soit le sein que j’ai mordu, je ne me rappelle pas une caresse du temps où j’étais tout petit : je n’ai pas été dorloté, tapoté, embrassé ; j’ai été beaucoup fouetté. Ma mère dit qu’il ne faut pas gâter les enfants, et elle me fouette tous les matins ; quand elle n’a pas le temps le matin, c’est pour midi, rarement plus tard que quatre heures.
Mademoiselle Balandreau m’y met du suif1. C’est une bonne vieille fille de cinquante ans. Elle demeure au-dessous de nous. D’abord elle était contente : comme elle n’a pas d’horloge, ça lui donnait l’heure. « Vlin ! Vlan ! Zon ! Zon ! – voilà le petit Chose qu’on fouette ; il est temps de faire mon café au lait.»
Mais un jour que j’avais levé mon pan2, parce que ça me cuisait trop, et que je prenais l’air entre deux portes, elle m’a vu ; mon derrière lui a fait pitié. Elle voulait d’abord le montrer à tout le monde, ameuter les voisins autour ; mais elle a pensé que ce n’était pas le moyen de me sauver, et elle a inventé autre chose. Lorsqu’elle entend ma mère me dire : « Jacques, je vais te fouetter ! – Madame Vingtras, ne vous donnez pas la peine, je vais faire ça pour vous.
– Oh ! chère demoiselle, vous êtes trop bonne ! » Mademoiselle Balandreau m’emmène ; mais au lieu de me fouetter, elle frappe dans ses mains ; moi, je crie. Ma mère remercie, le soir, sa remplaçante. « À votre service, » répond la brave fille, en me glissant un bonbon en cachette.
Mon premier souvenir date donc d’une fessée. Mon second est plein d’étonnement et de larmes. Mon père a un couteau à la main et taille un morceau de sapin ; les copeaux3 tombent jaunes et soyeux comme des rubans. Il me fait un chariot en bois. Il va être fini ; j’attends tout ému et les yeux grands ouverts, quand mon père pousse un cri et lève sa main pleine de sang. Il s’est enfoncé le couteau dans le doigt. Je deviens tout pâle et je m’avance vers lui ; un coup violent m’arrête ; c’est ma mère qui me l’a donné, l’écume aux lèvres, les poings crispés.
« C’est ta faute si ton père s’est fait mal ! »
Et elle me chasse sur l’escalier noir, en me cognant encore le front contre la porte. Je crie, je demande grâce, et j’appelle mon père : je vois, avec ma terreur d’enfant, sa main qui pend toute hachée. Je crie, on ne me répond pas. J’entends qu’on remue des carafes, qu’on ouvre un tiroir ; on met des compresses. « Ce n’est rien, vient me dire ma cousine, en pliant une bande de linge tachée de rouge. » Je sanglote, j’étouffe. Je dois avoir cinq ans et crois être un parricide. Ce n’est pas ma faute, pourtant ! Est-ce que j’ai forcé mon père à faire ce chariot ?
On me fait apprendre à lire dans un livre où il y a écrit en grosses lettres qu’il faut obéir à ses père et mère : ma mère a bien fait de me battre.
Jules Vallès, L’enfant, 1878
Vocabulaire
1. Suif
Graisse animale, de bœuf ou de mouton que l’on utilisait au XIXe siècle pour différents usages (pour l’éclairage par exemple).
2. Pan
Partie tombante d’une chemise très longue qui recouvrait tout le corps des enfants au XIXe siècle.
3. Copeaux
Morceaux de bois très fins qui tombent d’un morceau de bois que l’on coupe ou que l’on sculpte.